Notre civilisation est à un tournant
Deux choix sont possibles en matière de consommation quand il s’agit de s’alimenter.
- Celui des aliments issus de l’industrialisation à outrance avec
l’agriculture productiviste qui produit pas cher avec des rendements
énormes.
- Celui des aliments issus d’une agriculture progressivement
raisonnable évoluant vers le bio, la biodynamie, produisant plus cher
avec des rendements faibles.
Si je ne vous en dis pas plus, il est fort probable que beaucoup d’entre vous optiez pour le premier choix.
Pourtant, des différences essentielles apparaissent chaque jour plus nettement. Elles concernent d’abord
les moyens mis en œuvre.
- Le premier choix a besoin d’une mécanisation intensive et crée peu
d’emplois. Le laboureur est soit masqué et casqué, soit dans une cabine
isolée (parce qu’il ne veut pas respirer ce qu’il donne à la terre),
climatisée, informatisée, avec une machine qui marchera bientôt sans
pilote. C’est le progrès me direz-vous.
- Le deuxième choix crée des emplois qu’il faut bien rémunérer, ce qui
se répercute logiquement sur le produit fini. L’idéal est de le vendre à
proximité pour éviter les nombreux intermédiaires qui prennent leur
pourcentage au passage. C’est archaïque, me direz-vous. `
Curieusement, les super et hypermarchés développent des rayons BIO,
mais il est difficile de les conseiller quand on voit des miels bio de
Chine ou des figues bio de Turquie achetés à des prix défiants toute
concurrence, et dont la qualité bio est surtout sur l’étiquette…
Une grande différence est que l’agriculture productiviste utilise des
phytosanitaires qui ne sont autres que des
chemicals, des produits chimiques, pesticides-insecticides-fungicides dangereux pour la santé humaine.
Evidemment, les industriels ne vous le diront pas, ils vous diront même
l’inverse en affirmant que le choix N°1 est la seule façon de réduire
la faim dans le monde. Belle générosité si elle n’était pas orientée
d’abord vers leurs poches, avec l’aide de la bourse.
On se moque de nous en prenant les consommateurs pour des cobayes. Les scientifiques se réveillent quand ils ont vraiment la parole libre.
C’est le cas de nombreux ingénieurs agronomes arrivés à la retraite, comme j’ai pu le constater après le Grenelle de l’Environnement auquel j’ai participé.
Mon collègue britannique le Pr. John Beddington (nous avons le même
âge), spécialiste de la gestion des ressources naturelles et
« conseiller scientifique en chef » du gouvernement Anglais, a sonné le tocsin.
Dans un discours officiel [2] il estimait :
«
le monde, sans de profonds et rapides changements de
comportements individuels et collectifs, va vers un collapsus écologique
et économique global qu’il compare à un ouragan parfait (économique,
social et environnemental), qui se concrétisera vers 2030, donc dans 15 ans. Ce
scénario associe conjointement une crise alimentaire, sanitaire et
sociale, une crise énergétique et une crise écologique majeure
caractérisées par un effondrement brutal des écosystèmes, à l’échelle de la biosphère, c’est-à-dire de la planète toute entière, et dépassant les capacités de résilience écologique de la biosphère (à court, moyen ou long terme). »
Il ajoute :
«
Cette situation explosive représente la plus
grande menace pour la stabilité et la paix mondiale qui ait jamais
existé. Des centaines de millions d’hommes et de femmes vivent dans les
régions les plus exposées et n’auront pas d’autre choix que de partir
pour tenter de survivre ailleurs. Les sources de conflits, d’épidémies,
de guerres seront innombrables… et jusqu’à présent l’humanité n’a encore jamais apporté la preuve qu’elle savait gérer ce genre de situation. »
Que faire ? Attendre 15 ans les bras croisés ou réveiller les
consommateurs exploités ? Attendre de voir plus de cancers chez des
sujets jeunes – c’est le cas déjà aujourd’hui – en annonçant aux
familles qu’on ne connaît pas les causes et qu’on les cherche sans les
chercher vraiment ?
Avec le tout-génétique, on a voulu faire mieux que la nature et cela dans tous les domaines de l’humain [3]. La
déconstruction de tous les modèles rationnels qui
consiste à tout détruire, pensée par les philosophes brillants –
Dérida, Foucault, Deleuze et bien d’autres – perturbés dans leur vie
intime, obsédés par la mort, valorisés par des médias philosophiquement
incompétents pour suivre la mode, conduit l’humanité au suicide.
Les pesticides de Monsanto et autres lobbies [4] très puissants ravagent notre santé et notre planète
Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) basé à Lyon, agence de l’Organisation mondiale de la santé (OMS),
vient enfin de classer cinq pesticides dont le fameux Roundup, via son principe actif le glyphosate, comme cancérogènes « probables » ou « possibles ».
La prudence exige de minimiser les risques puisque ces produits sont
largement utilisés et répandus dans les environnements agricoles.
On qualifie de probable et de possible quand c’est certain. Pour ne « pas faire peur ».
«
Le glyphosate, présent notamment dans le Roundup, est classé
cancérogène “probable chez l’homme” (groupe 2A), même si “les preuves
sont limitées” en ce qui concerne la survenue d’un lymphome non
Hodgkinien ou d’un cancer de la prostate », souligne le CIRC.
Les études d’exposition des agriculteurs menées aux États-Unis, au
Canada ou en Suède, publiées depuis 2001, sont enfin suffisantes pour
modifier la classification, établie en 1991, où le Roundup a été sorti
de la catégorie des cancérogènes pour l’homme (en 1985, une première
évaluation l’avait placé dans les « cancérogènes possibles »). Il
fallait attendre des catastrophes de santé pour oser le dire !
La production et la vente de Roundup ont explosé depuis
l’introduction de cultures génétiquement modifiées (AGM = Aliments
génétiquement modifiés [5]).
En plus de l’agriculture, ce produit fortement toxique est utilisé
dans les forêts et chez les particuliers dans leur jardin pour qu’ils
n’aient pas à se baisser pour supprimer quelques mauvaises herbes.
Le glyphosate a été retrouvé dans l’air, dans l’eau et dans la
nourriture, selon le CIRC qui précise que la population est notamment
exposée lorsqu’elle habite à côté de zones traitées, même si les niveaux
d’exposition observés sont
« généralement bas ».
Cette nouvelle classification prend aussi en compte des études expérimentales chez l’animal. Le Roundup est le
« désherbant le plus utilisé au monde », souligne l’association Générations futures qui se félicite de cette évaluation
« qui reconnaît la dangerosité avérée du glyphosate ».
Les quatre autres sont les insecticides tels que le
malathion,
le diazinon, le
tetrachlorvinphos et le
parathion. Les deux premiers sont classés dans le groupe 2A des cancérogènes probables avec, comme pour le glyphosate, des
« preuves limitées » dans la survenue des lymphomes non hodgkiniens et des cancers de la prostate pour le premier, du poumon pour le second.
Les insecticides
tetrachlorvinphos et
parathion, qui
font déjà l’objet d’interdictions ou de restrictions dans de nombreux
pays, ont été classés dans le groupe 2B des cancérogènes « possibles »
au vu des données chez l’animal.
Fin mars de cette année, la revue très reconnue
Human Reproduction [6]
affirmait que les pesticides réduisent de plus de 50 % le nombre de
spermatozoïdes (86 millions par éjaculat contre 171 millions).
Tout ceci vient enrichir la longue liste des produits démontrés dangereux pour notre santé :
- La saccharine, édulcorant artificiel, officiellement
cancérogène pour la vessie qui a été largement et longuement utilisée
dans les sodas et cocas light.
- Les PCB (polychlorobiphényles) fluides de refroidissement
pour les transformateurs électriques, les condensateurs et les moteurs
électriques, vrais cancérogènes chez les animaux et l’homme, des
maladies du foie, des troubles neurologiques, (l’autisme) et le cancer.
- Le polystyrène, largement utilisé dans les emballages alimentaires dont la production génère d’énormes déchets.
- Le DDT, l’insecticide pour lutter contre les moustiques
vecteurs du paludisme, perturbateur endocrinien interdit dans tous les
États-Unis.
- La dioxine, l’un des précurseurs de l’agent Orange
s’accumule dans la chaîne alimentaire, principalement dans les tissus
adipeux des animaux et des hommes.
- L’Agent Orange, herbicide défoliant largement utilisé
pendant la guerre du Vietnam (400 000 personnes tuées ou mutilées,
500 000 enfants nés avec malformation et impact sur la santé de
3 millions de soldats américains et leurs familles). La formule de
Monsanto avait des niveaux de dioxine bien supérieurs à l’Agent Orange
produit par Dow Chemicals, l’autre fabricant.
- L’engrais à base de pétrole, qui tue les micro-organismes bénéfiques à la terre.
- Le Roundup, herbicide puissant qui éradique les mauvaises
herbes du jour au lendemain, rapidement adopté par les agriculteurs qui
réduisaient ainsi leur main-d’œuvre trop coûteuse. L’utilisation a
augmenté quand Monsanto a introduit le «Roundup Ready »
(résistant au glyphosate) pour les cultures, permettant aux agriculteurs
de saturer tout le champ en désherbant sans tuer les cultures. Il est
retrouvé dans les nappes phréatiques, les sols, les cours d’eau et même
l’air et de plus en plus dans les aliments. Il a largement tué les
papillons et de très nombreux cheptels d’abeilles.
- L’aspartame, commercialisé sous le nom de NutraSweet, faux
sucre dangereux à la longue pour les reins, le foie et même le cerveau,
fortement présent dans tous les produits dits light.
- L’hormone bovine de croissance (rBGH = Somatotropin = Hormone de croissance), injectée
aux vaches laitières dopées pour produire plus de lait. Ainsi elles
développent des pis gonflés, des mammites dont le pus se mélange au
lait, imposant l’utilisation des antibiotiques. Les laits contenant les rBGH sont largement suspectés d’être en cause, chez l’humain, dans l’apparition de cancers du sein, de la prostate et du côlon.
- Les cultures/OGM génétiquement modifiés, avec les graines conçues pour résister au Roundup.
Monsanto attaque évidemment toutes les études scientifiques en
inondant – jamais gratuitement – les médias avec des demandes
reconventionnelles d’organismes « indépendants », des scientifiques, des
associations industrielles, des blogs, des médias sociaux parrainés, et
des articles d’entreprises de relations publiques « privées » toutes
créées, financées et dirigées par la multinationale [7].
J’ai été fort étonné de voir récemment la Ligue contre le Cancer
valoriser les pesticides pour la santé. Je m’interroge quant à l’origine
de tels écrits pour une organisation très riche qui en est encore au
tabac et à l’alcool parmi les facteurs de risques de cancer.
- Les semences Terminator, destinées à produire des graines
stériles, ce qui impose d’en racheter chaque année. Cette semence n’est
pas vendue sur le marché, mais Monsanto demande aux agriculteurs de
signer un contrat pour ne pas conserver ou vendre les semences d’une
année sur l’autre, ce qui les oblige à acheter de nouvelles semences.
Selon
Organic Consumers Association :
«
Il y a une corrélation directe entre notre approvisionnement en
produits génétiquement modifiés et les 2 milliards de dollars que les
États-Unis dépensent chaque année pour les soins médicaux, à savoir une
épidémie de maladies chroniques liées à l’alimentation.
À la place des fruits, légumes, graines et animaux nourris à
l’herbe bons pour la santé, les élevages industriels américains et les
transformateurs alimentaires produisent une surabondance de malbouffe
génétiquement modifiée qui provoque des maladies cardiaques, des
accidents vasculaires cérébraux, le diabète et le cancer, soutenus par
des subventions d’Etat, tandis que les agriculteurs biologiques ne
reçoivent pas de telles subventions. »
La science manipulée n’est pas synonyme de bien commun, sauf pour les
lobbies milliardaires, aux dépens d’une population manipulée,
exploitée.
L’excellent film produit en France par Jupiter
La Santé dans l’assiette [8]
doit
entrer dans toutes les familles. J’ai plusieurs fois animé des soirées
après la projection de ce film et me suis rendu compte de l’impact
majeur des informations qu’il apporte.
Il est urgent de trouver des solutions alternatives écologiques et de santé
Ces solutions existent. Elles sont créatrices d’emplois pour les
jeunes, qui resteront en bonne santé. De plus en plus de jeunes couples
s’installent et développent des produits d’une agriculture menée de
manière écologique, biologique, biodynamique et développent de plus en
plus la
permaculture [9]
.
Ils mettent leurs produits sur les marchés de proximité, créent des contacts fructueux en termes humains et économiques.
Nul doute que nous ne pouvons plus nous laisser faire et manipuler
par des exploiteurs qui pénètrent le monde des décideurs politiques dans
les ministères, des représentants que nous avons élus de gauche comme
de droite, à Paris et de plus en plus à Bruxelles. Ils ne sont pas au
service du bien commun, de la collectivité.
Informer de plus en plus et de mieux en mieux, en organisant des journées spécifiques comme celle du 27 septembre prochain
TransitionCitoyenne.org ou la journée Européenne d’action le 11 octobre
CollectifStopTafta.org devient une nécessité.
Ecoutez aussi mon excellent collègue de l’université de Caen, le Pr Gilles-Eric Séralini dans l’émission
La tête au carré sur France Inter : «
OGM, pesticides et poisons cachés »
L’étude du CRIIGEN qu’il a menée, publiée en janvier 2014, précise
que le Roundup en tant que tel n’a jamais été évalué avec ses adjuvants
qui le rendent des centaines de fois plus nocif que sa substance active
le glyphosate. Donc, si le glyphosate est maintenant considéré comme
“cancérigène”, qu’est-ce que cela doit être pour le Roundup ? Ceci sans
parler des effets cumulatifs et des effets cocktails qui, évidemment, ne
sont pas évalués [10].
Consommateurs, pas cobayes !
Nous voulons la transparence concernant les OGM et AGM, que les
produits soient étiquetés clairement et pas en caractères illisibles
sans une loupe qui devrait être exigée à l’entrée des supermarchés.
Faudra-t-il confier l’enquête à Médiapart ? Pourquoi pas !
J’ai signé la pétition «
Consommateurs pas cobayes ! ». Nous
sommes déjà 150 000 mais devrions être des centaines de milliers, aller
jusqu’au million de signataires. La campagne continue sur
ConsommateursPasCobayes.com
Agir ensemble et autour de soi est devenu déterminant pour l’avenir !
Mes prochaines conférences sur ces sujets auront lieu à Toulon et Nice respectivement, les 4 et 5 juin prochain.
Professeur Henri Joyeux
Sources :
[1] «
Consommateurs pas cobayes ! » campagne-pétition pour un
moratoire sur l’importation des OGM et du Roundup en application du
principe de précaution, en cours d’étude à la Direction Générale de la
Prévention des Risques au Ministère de l’Ecologie – à lire et signer
sur
www.consommateurspascobayes.com
[2] Devant des ONG environnementales et des responsables politiques en mars 2009
[3] Je viens de terminer la lecture du livre posthume du grand philosophe Jean François Mattéi «
L’Homme dévasté » et je lis en ce moment celui d’un autre grand philosophe, Rémi Brague «
Le Règne de l’Homme – Genèse et échec du projet moderne ». Ils feront l’objet d’une prochaine lettre.
[4] Monsanto aux USA, Syngenta AG en Suisse, Bayer Cropscience en
Allemagne, Dow chemical USA et France avec sa filiale Agrosciences,
DuPont de Nemours en France avec sa filiale Pioneer Hi-Bred
International , Cargill USA et France, Glencore International
AngloSuisse, Bunge aux USA, Limagrain en France et BASF en France.
[5] En 2015, 46 variétés de plantes transgéniques sont autorisées dans
l’Union européenne pour l’alimentation humaine et animale, dont
26 variétés de maïs. Au total, le Colza résistant aux pesticides, le
blé, le soja, la canne à sucre, le maïs insecticide (Bt–corn), le coton,
le riz d’or chargé en vitamine A sans réfléchir aux surcharges en
vitamine A délétères pour le foie, les tomates de longue durée contenant
des gènes résistants aux antibiotiques qui peuvent se transmettre à
l’homme. On nous prépare fraises, ananas, poivrons et bananes
génétiquement modifiés pour qu’ils restent frais plus longtemps et sans
goût.
[6]
Is dietary pesticide exposure related to semen quality ? Positive evidence from men attending a fertility clinic, Hagai Levine and Shanna H. Swan
[7] Nombre de vice-présidents et de conseillers juridiques de Monsanto
occupent actuellement des postes à la FDA. Clarence Thomas, ancien
avocat de Monsanto, maintenant juge à la Cour suprême, statue en faveur
de Monsanto dans chaque affaire portée devant lui.
[8]
La santé dans l’assiette est un film de Lee Fulkerson avec Caldwell Esselstyn, T. Colin Campbell. Bande-annonce VF – AlloCiné –
[9] Elle se définit comme «
un art de vivre qui associe l’art de
cultiver la terre pour la rendre fertile indéfiniment avec l’art
d’aménager le territoire. Elle n’est pas un mode de pensée mais un mode
d’agir qui prend en considération la biodiversité des écosystèmes »
[10]
Bio consomacteurs provence
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indépendant sur la santé, spécialisé dans la prévention des maladies
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